Les Mots Z’Arts Voyageurs (Voyagination)

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 Planitude 2/2 Extrait du 1er tome.

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Claire Obscur
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Claire Obscur

Date d'inscription : 10/01/2016

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MessageSujet: Planitude 2/2 Extrait du 1er tome.   Planitude 2/2 Extrait du 1er tome. Horlog1015.08.16 16:02

Planitude 2/2 Extrait du 1er tome. 001710



Sculpture de Sylvie-Shamballa Claudepierre métal et résine


1ère partie clic ici

Elle chassa des poussières qui l'incommodaient et se collaient à elle comme des sangsues. Courroucée, elle leur souffla dessus et les éloigna définitivement d'elle avec l’aide d’un heureux coup de vent. Avant elle vivait dans une région où le vent vous décollait les cheveux sans vergogne, et puis la maison était devenue trop grande, et elle avait déménagé. Certes pour une maison plus petite, mais tellement jolie avec ses panneaux de marbre blanc, ces petites moulures de bois d’ébène sous le toit, mais le vent qui balaie tout n’était pas au rendez-vous, et c’était une région pleine de poussière. Elle avait beaucoup pesté contre elles, mais n'avait pas pu s'en débarrasser.
Bon, pour l’instant, elle ne voulait plus y penser, consacrée à nouveau à cette merveilleuse expérience.
Elle se sentit devenir fluide, et s'étira encore, une partie d'elle se mélangea aux rayons du soleil, une autre aux vagues d'écume blanches, une autre encore papillonna dans les branches des arbres en fleurs et elle put presque en sentir les parfums subtiles et tendres. Bientôt les gens feraient des bouquets, ou des tartes, ou des confitures, et les abeilles porteraient les pollens. Que la vie était belle, même en cet instant où elle distinguait mal ses enfants restés sur le sommet du rocher abrupt. Elle se dit qu'elle devait rentrer, qu'elle était peut-être allée trop loin, et que finalement, elle n'avait pas de mode d'emploi pour réussir totalement cette expérience. Malgré toutes ces préparations, il restait une part d’inconnu. Elle fit un demi-tour pour estimer la distance parcourue, et s'aperçut que tout avait changé. Tout était si blanc maintenant autour d'elle. Comment avait-elle pu monter si haut dans les nuages sans s'en apercevoir. Mais là aussi, tout était beau, tranquille, et surtout elle s'étonnait de ne pas avoir froid, elle qui avait craint et détesté cette sensation toute sa vie. Alors elle osa faire des pirouettes et se délecter de ce corps qui était enfin si léger, fabuleusement étirable et fluide. Elle se mit à rire, oubliant presque qu’elle devrait rentrer et que ses enfants l’attendaient. Puis à travers le blanc des nuages, elle les vit à nouveau, silhouettes d’ombres lointaines et brunes dans le soleil couchant, venues l'accompagner dans cette ultime expérience « des grands seniors », comme elle l’avait appelée en riant. Elle leur envoya une pensée d'amour et de joie en les remerciant très fort d'avoir été ce qu'ils avaient été pour elle, et d'avoir soigné ainsi ce vol merveilleux. La vie lui avait fait ce cadeau de savoir qu'il était temps de se préparer. Alors dans le silence des pages blanches, elle avait écrit ses souhaits, et ils l'avaient aidée à les accomplir jusqu'au dernier. Elle avait tout planifié avant, tout fait dans l'ordre, rien laissé au hasard. Et puis tout d'un coup, elle n'avait plus rien fait, car ce n'était plus de son pouvoir. Elle s’était ratatinée sur elle-même. Durant tous ces derniers mois, elle s'était sentie toute petite et un peu à la merci de ces préparatifs qui ne lui laissait aucun repos puisqu'il fallait visiter les lieux proposés et se tenir prête à l'éventualité que ce dernier serait le bon. Donc elle avait été de toutes les expéditions, et ses enfants aussi puisque c'est eux qui la transportaient de partout. Une seule ombre au tableau : ces poussières. Ces maudites poussières qu'elle voyait partout et qui lui donnaient envie de tousser. Toujours les mêmes qu'elle n'arrivait pas à chasser. Ça, elle n'aimait pas. Et même en cet instant, elles la suivaient encore et essayaient de s'immiscer dans sa vie. Mais elle ne voulait pas d'elles, et s'évertuait mentalement à souffler dessus pour les éloigner. Déjà petite, elle y était allergique. Maintenant, il était hors de question de se laisser envahir encore. Pendant quelques mois, elle n’avait rien dit, avait pris son mal en patience et avait dû cohabiter avec elles, en silence. Mais là, ici, au grand air en plein vol, il n'y avait plus aucune raison.
 
Venant comme de très loin ou peut être de trop près, comme de l’intérieur d’elle-même, une voix étouffée, lui disait qu'elle savait pourquoi elles étaient là, mélangée à sa vie de tous les jours. Comme à chaque fois, lorsque cela se présentait, elle refoula, essayant de se concentrer sur le paysage. Mais cette fois-ci, la voix insistait, gonflait, refusait de capituler, s’imposant à elle comme sa conscience. La voix lui enjoignait d’accepter ce qu’elle essayait de lui dire, c’était bon pour elle… Pour pouvoir vivre la suite. Elle ne pourrait pas rester indéfiniment ici en refusant l'évidence. Elle revit le petit pot de marbre blanc de Carrare aux moulures de bois d’ébène du petit couvercle. Elle se vit le regarder dans la vitrine, et un instant plus tard le tenir dans ses mains, en ôter le couvercle, et parcourir l’intérieur du pouce pour en apprécier la finesse de la patine. Elle n'avait rien voulu d'autre. Et c’est ce vase ouvragé par un artiste qu’elle avait désigné dans ses exigences. Il avait été sa dernière demeure. Et les poussières grises étaient arrivées en même temps qu’elle dans cet enclos de marbre blanc. Elles l’avaient accompagnée, serrées, collées contre elle. Et quand on avait ouvert le couvercle de sa dernière demeure, elles l’avaient suivie. Elle n’avait rien connu de plus fidèle que ces cendres grises, vestiges de la boîte en carton, incinérée avec elle. Elle remplissait depuis plusieurs mois déjà son petit bocal, trônant sur la poutre près de la cheminée, pour qu’elle ait bien chaud l’hiver durant. Patiemment, elle avait attendu que son voyage se termine, au milieu des siens comme elle l'avait souhaité, et ils avaient bien fait les choses pour ce dernier voyage ! Elle avait assisté à tous les préparatifs, attendant impatiemment et redoutant en même temps l'instant où elle allait pouvoir sortir de cette amphore étroite. Maintenant, libre, elle s'étirait et s'étirait encore, elle allait voler vers un autre destin et elle était contente. Elle était si bien, loin de la douleur des derniers jours, loin des souffrances. C'était si beau. Elle était chez elle, chez « l’autre chez elle », le premier de tous, de retour dans l'univers. Libérée, libre. Elle était heureuse d'avoir choisi ce moyen pour s'en aller. Il y aurait toujours un grain d'elle quelque part qui virevolterait par là, auprès de sa famille pour les voir vivre et évoluer. Elle se rassembla une dernière fois et comme une nuée d'abeilles repartit voler autour d'eux pour une caresse finale, à sa manière. Alors, elle sut pourquoi les vivants éternuaient parfois, comme ça, sans raison apparente.
 
Note de l’auteur. L’incinération n’est pas un truc auquel je tiens, je dirais même que je ne préférerais pas, à cause du feu qui me fait peur, et pourtant, je ne crains pas trop les brûlures, mais il me fait l’effet d’une bête dévorante qui gagne à tous les coups. Et je n’aime pas ça, alors j’ai imaginé cette fin, parce qu’un jour peut être ce mode sera obligatoire, ou reviendra moins cher que l’enterrement classique. Je voulais en extraire les avantages pour me convaincre moi-même que ce mode-là n'était peut-être pas si mal. Cette histoire n'a donc rien à voir avec un souhait… Pourtant, le marbre de Carrare au-dessus d'une cheminée, ça me tente bien…
écrit 27/08/2005. réédité en 2014. posté sur Ipagination en 2015


Dernière édition par Claire Obscur le 15.08.16 16:27, édité 3 fois
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Claire Obscur

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MessageSujet: Re: Planitude 2/2 Extrait du 1er tome.   Planitude 2/2 Extrait du 1er tome. Horlog1015.08.16 16:09

4 ème et dernier extrait de "Je reste ou je pars ? 1er tome de 12 nouvelles de la série Clair-Obscur
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Vividecateri

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MessageSujet: Re: Planitude 2/2 Extrait du 1er tome.   Planitude 2/2 Extrait du 1er tome. Horlog1018.08.16 17:34

Je me disais aussi que cela pouvait être ce genre d'envol à cause du regard des enfants... tristes... c'est malin très malin et puis je connaitrai peut-être cela... Car oui je vais me faire incinérer... Et sa Majesté aussi... Et mes cendres??? je me pose la question... Ils en feront ce qu'ils voudront... Et pis c'est tout... mais ce que j'aimerais c'est tomber après mon envol... au pied d'un arbre... n'importe lequel... j'aime beaucoup ta nouvelle kissous
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MessageSujet: Re: Planitude 2/2 Extrait du 1er tome.   Planitude 2/2 Extrait du 1er tome. Horlog1026.08.16 17:34

Merci, mon challenge, toujours le même" garder le suspens  en essayant cependant d'orienter le lecteur pour deviner... bien sûr toujours avec mes idées bizaroïdes.. C'est un de mes préférés !!!  
BIsKIssous cheers cheers
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